Dans le regard de ma fille

En septembre 2020, j’apprenais que j’allais devenir une maman. L’angoisse m’a pris, les questionnements m’ont émergée dans la peur de faire vivre à ma fille ce que j’ai vécu : la pression corporelle.

Je ne vis pas dans un corps large, mais je vis dans un corps qui ne répond pas aux standards de beauté de la société et qui n’y répondra jamais. Ça, ça m’a pris du temps avant de le comprendre, mais surtout avant de l’accepter.

J’ai vécu toute ma jeunesse avec ma mère et j’ai vite compris que l’insatisfaction corporelle existait. Sans le vouloir, elle m’a plongée dans la culture des diètes. J’ai donc été trainée dans des rencontres de pesées et de motivation. Le vocabulaire était banal, mais poignant. Des mots comme : culpabilité, tricherie et privation étaient de la partie.

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Avec les années, j’ai compris que je me devais de contrôler mon corps, parce que j’avais compris qu’on pouvait le contrôler, mais surtout qu’on devait le faire. Pour moi qui adore les défis, je me suis lancée dans cette quête dès l’adolescence. J’ai tout vécu à travers ces chemins : les régimes hypocaloriques, hypoglucidiques, végétariens, entre autres. Avec tous ces défis, je n’étais pas plus satisfaite des regards et de mon reflet dans le miroir. Je me suis questionnée maintes fois pour comprendre d’où venait le problème. Venait-il de moi?

Les années passèrent dans l’insatisfaction alimentaire, dans les restrictions et la tristesse de n’être jamais satisfaite. De l’hyperphagie aux jeûnes intermittents, en passant par du surentrainement, rien ne changeait, je n’étais pas plus heureuse! Jusqu’à ce que…je vive la grossesse. Le seul moment de ma vie où la culpabilité m’a quittée pendant 9 mois et m’a laissée tranquille. Je ne me sentais plus du tout coupable, enfin! Je vivais ma ¨best life¨ et je me trouvais si jolie avec ce beau ventre qui grossissait de plus en plus. Jusqu’à temps qu’on me pèse aux rendez-vous de suivis de grossesse…On me disait que je prenais ¨trop de poids¨, mais que cela n’affectait pas le bébé. Il était où le problème alors? Venait-il de moi?

Dès la naissance de ma fille, j’ai remarqué que mon regard s’était adouci, que j’étais moins sévère envers mon corps malgré mon passé, malgré les commentaires des médecins lors de ma grossesse et surtout malgré le poids qui pèse sur les épaules des nouvelles mères dès l’accouchement. Est-ce que la grossesse m’avait guérie?

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Je sentais que c’était maintenant que le vent devait changer de direction. Je me suis donc mise à dévorer les balados et les livres parlants d’acceptation corporelle, de bienveillance et de dénonciation de la culture des diètes. J’ai poursuivi mes routines d’entrainements à la maison, tout en écoutant mon corps et surtout sans me mettre de pression. J’ai aussi caché ma balance (je ne me souviens même pas où). Mais surtout, je me suis vue dans le regard de ma fille et j’ai compris que j’étais, peu importe ma taille et mon régime alimentaire… SA maman, malgré tout. J’avais enfin réalisé que le problème, il ne venait pas de moi, il venait d’une société où la culture des diètes en est trop imprégnée et où la bienveillance se faisait miroitée devant un shake protéiné ou une barre amaigrissante.

Dans le regard de ma fille, j’ai compris que je ne voulais pas qu’elle vive ceci à son tour et que ça passait par moi avant tout. Comme on dit, ¨maman heureuse, bébé heureux¨. J’apprends encore à écouter mes signaux de faim et les accueillir sans les restreindre, à éviter de me comparer et à être douce envers moi-même.

Merci Billie.

Annie-Claude

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